Artosexe #5 : « Faire l’amour et la guerre. »

Carolee Schneemann

Souvenez-vous de ce fameux slogan des années 60’s, « make love, not war », repris dans des chansons de John Lennon (Mind Games) et Bob Marley (Trouble no More). À l’heure de la révolution sexuelle, Carolee Schneemann, artiste américaine, en a décidé autrement. Bravant les tabous autour du sexe et d’une société où l’homme domine, la jeune femme n’hésite pas à choquer pour se faire entendre…

« En tant que peintre, je n’ai jamais accepté les tabous visuels et les interdits concernant certaines parties spécifiques du corps. »

Carolee Schneemann

Née en 1939, Carolee Schneemann se construit une vision moins pudique et idéalisée du corps humain grâce à son père médecin. Durant ses études, elle est expulsée du Bard college de New-York après avoir créé des autoportraits où elle posait complètement nue, jambes écartées (du style l’Origine du Monde de G. Courbet). Avec ce fort tempérament, elle fait son entrée dans le monde de l’art, alors même que ses professeurs lui rappellent de ne pas prendre cette passion trop à cœur, car « [elle] n’est qu’une fille » (comme on aime ce genre de remarques…). Longtemps ignorée, elle construit sa place dans un milieu majoritairement masculin… jusqu’à ses premières œuvres à la croisée du théâtre, du cinéma et de l’art.

Carolee Schneemann, « Fuses« , 1967

Une « sextape » poétique

Si je vous parle de cette artiste rebelle et engagée, c’est pour son film expérimental Fuses (1967). Pour ce travail, Carolee décide de filmer ses ébats avec son amant de l’époque, James Tenney. Pellicule agrandie, peinte, couverte d’acide ou colorée, elle donne une vision poétique et artistique de l’acte sexuel. Le plus étonnant? Ce ne sont pas les images crues ou l’incursion voyeuriste dans l’intimité d’un couple qui posent le plus problème. Le hic, c’est le genre de notre artiste. L’oeuvre transcrit la perception d’une femme sur deux corps libérés de tout tabou. En bref, elle fait l’amour pour faire la guerre à une société où « l’érotisme masculin lubrique supprime [l’]expérience » des femmes.

Carolee marque par une réflexion novatrice en rendant aux femmes le pouvoir de représenter leur propre corps et leur sexualité ; de s’affranchir des normes sexuelles masculines et hétéro-normées. Cette provocation constante dans ses œuvres a en réalité vocation à remettre en question les préconçus liés au « beau sexe« . En outre, en utilisant son propre corps, elle se réapproprie le nu féminin et le dévoile sensuel, rebelle et complexe.


Carolee Schneemann, « Fuses« , 1967

Mais encore…?

Décédée en 2019, Carolee a su modifier les regards (masculins ou féminins) posés sur nos corps de femmes. Elle a également œuvré à dénoncer la domination masculine dans le monde de l’art (Interior Scroll, 1975). À travers cette performance provocatrice, elle revendique son indépendance en tant qu’artiste femme en lisant un texte sur la misogynie dans l’art, inscrit sur un rouleau de papier sorti de son vagin.

Dans Up to and Including Her Limits (1973-1976), elle dessine nue, tenue par un harnais, les mouvements aléatoires créés par le balancement de son corps.

Pour aller plus loin, Carolee s’est également portée témoin des grands conflits d’une époque dans son travail (guerre du Vietnam, du Liban, 11 septembre 2001). Dans ces projets, elle questionne l’enjeu des images médiatiques et leur esthétique. Si vous êtes curieux.se d’en découvrir un peu plus sur cette femme étonnante : ICI !

L'incarnation du magazine, avec sa propre personnalité, ses propres aventures et ses propres récits. Il est libre, ouvert et souvent incorrect. Derrière lui se cache tout.e.s les rédactr.ices.eurs qui ne veulent pas donner leurs identités lors de certaines histoires. Il est la liberté d'être ce qu'on veut à jamais : Épanoui et en train de manger des pâtes !

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