Pourquoi avoir choisi ce nom de drag spécifiquement ?
CH : Sachez que mon nom, Chienne, se prononce à l’italienne, à savoir kiéné. J’ai vécu en Italie pendant quelque temps et, à mon retour en France, quelqu’un m’a traité de chienne. À l’époque, ça m’avait beaucoup amusé parce que c’était probablement le dernier qualificatif qui me décrivait. Ce mot est resté dans ma tête durant plusieurs jours et, par contraste avec ma personnalité, j’ai eu envie de l’adopter en nom de scène.
Quand avez-vous commencé le drag ? Comment avez-vous découvert le drag ?
CH : « Avant toute chose, il faut savoir que dans la vie, je suis professeur et artiste de cirque. J’ai découvert le drag grâce à l’émission Rupaul’s Drag Race : j’y ai vu une manière d’améliorer mon art du cirque aérien, et j’en suis tombé amoureux. J’ai fait ma première fois en drag lors de la Pride de Strasbourg en juin 2022, et depuis on ne m’arrête plus.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer dans cette activité ?
CH : J’ai eu envie de me lancer dans le drag pour améliorer mes numéros de cirque aérien : le drag me permet d’ajouter d’exprimer mon univers sans contrainte sociale en y incorporant des costumes incroyables, de longues perruques, des attitudes plus sensuelles, alors que hors drag, je suis corseté par ma condition masculine.
Quelles ont été les difficultés rencontrées lors de votre transition vers cette activité ?
CH : J’ai beaucoup de chance et n’ai pas rencontré de difficulté majeure. Déjà, grâce à mon métier, je savais déjà performer et me maquiller. Ensuite, dès que j’ai commencé le drag, j’ai pris des cours de couture avec Aline Bailly, une costumière incroyable, qui m’a tout appris de A à Z. Avant de la connaître, je ne savais même pas enfiler une machine, et aujourd’hui, un an plus tard, je peux réaliser les robes que vous voyez sur les photos qui accompagnent cet article. La seule limite à mes ambitions reste finalement l’argent pour acheter mon matériel, ainsi que le temps pour coudre tout ça.
Est-ce que le drag est actuellement votre métier ?
CH : Non, le drag, c’est ma passion, mais pas mon métier. En tant qu’artiste de cirque, je suis moins payé en drag qu’hors drag, ce qui peut sembler paradoxal puisque le drag me demande plus de travail et de temps de préparation.
Quel a été votre ressenti lors de votre première fois en drag ?
CH : Ma première fois en drag, c’était à la Pride de Strasbourg en juin 2022. Au début, j’avais beaucoup d’appréhension, je me demandais comment les gens allaient réagir, si mon style allait être validé, etc. Au final, ça s’est super bien passé, les passants m’invitaient à prendre des photos avec eux, me complimentaient, c’était super !
Quelle est votre définition du drag et que cela représente pour vous ?
CH : C’est pousser l’ornement et l’attitude à son maximum pour s’extraire des normes genrées. Et pour moi, cette définition s’applique tout particulièrement sur scène, où je peux porter des costumes incroyables, danser en talons, réaliser des mouvements ultra sexy -qui seraient probablement très bizarres si je le faisais hors drag-, bref, c’est tout ce que j’aime !
Vous avez participé à un Drag Challenge, comment l’avez-vous vécu ? Comment cela se passait avec les autres participant.e.s ?
CH : C’était super ! C’était ma première fois sur scène en tant que drag queen, et ça s’est vraiment bien passé : j’ai présenté un numéro de danse et de cerceau aérien grâce auquel j’ai eu la chance de recevoir une standing ovation et de gagner le concours.
Est-ce que vous créez et confectionnez vos looks (perruques, tenues, accessoires, maquillages, ongles) de A à Z ?
CH : Oui, je mets un point d’honneur à confectionner toutes mes tenues moi-même. Je fais également mes maquillages et mes coiffures, même si ces dernières restent très simples.
Combien de temps vous faut-il pour trouver l’inspiration de la tenue, la confectionner et créer un cadre autour de celle-ci ?
CH : Quand je parcours les réseaux sociaux ou que je regarde des défilés, j’enregistre les tenues qui me plaisent, et un beau jour, quand je suis en manque de projets créatifs, je me lance dans leur reproduction. Pour le temps de couture, ça dépend des projets : ma robe rouge ainsi que ma robe verte m’ont prise chacune environ 300 heures de travail, car j’ai réalisé les fronces à la main, alors que ma robe blanche ne m’en a pris qu’une trentaine. C’est très variable.
Comment définiriez-vous votre univers ?
CH : Je suis la reine du bohème : en tant qu’artiste libre, je vis l’instant présent à travers mon art, sans souci des possessions matérielles ni des conventions sociales. Ça se retrouve donc dans mon métier, le cirque, et également dans mon drag, vagabondant dans les nuages de tulle.
Quelles sont vos différentes inspirations pour vos looks et pour la personnalité de votre drag ? Quel est votre signe distinctif dans vos créations ?
CH : Mon style est relativement naturel pour une drag queen : je m’inspire des fleurs, dont j’emprunte l’esthétique pour réaliser mes robes, et je réalise des maquillages qui viennent soutenir mes traits plutôt que de les redéfinir. Pour le côté extra caractéristique des drag queens, je vais plutôt miser sur les ornements : les broderies, les perles, les sequins, les cristaux, les fronces, etc. Mes références principales sont Elie Saab ou encore Zimmerman.
Où pouvons-nous vous voir en représentation artistique / show ? Et que proposez-vous comme pratique artistique ?
CH : Nulle part ! Pour le moment, je n’ai pas prévu de faire de show : je préfère me concentrer sur mes créations en couture. Quand je décide de sortir de ma grotte pour faire des représentations, je propose de l’exotic floorwork (danse au sol), ainsi que du cirque aérien, principalement du cerceau aérien.
Souhaitez-vous porter un message à travers votre activité ?
CH : Non, je n’ai pas de message. Je fais du drag pour moi, parce que c’est ce que j’aime faire, et c’est tout.
Avez-vous un message à adresser aux personnes qui souhaitent se lancer dans le drag ?
CH : N’hésitez pas à prendre des cours ! Que ce soit pour la couture, la danse, le maquillage, ou que sais-je encore, parfois, c’est le meilleur investissement qu’on puisse faire pour gagner du temps et de la sérénité avant ses premières prestations.