Aujourd’hui on va parler d’une forme de sexualité dite « conventionnelle ». C’est-à-dire la norme et expliquer ce que ça peut bien être. Bien entendu, l’équipe du magazine lutte quotidiennement pour déconstruire notre société patriarcale, qui nous sert des normes emplies de discriminations. Et cela passe par l’information sur des pratiques sexuelles peu connues, des orientations et identité LGBTQIA+ invisibilisées, la discussion autour de sujets tabous etc. Mais parler de ce qui est considéré comme normatif a ses avantages aussi !
Quand on souhaite éduquer sur un sujet, c’est avec la conviction de dédiaboliser l’inconnu et apporter à l’ignorance d’un·e individu·e des réponses rassurantes. Par exemple, quand on entend « polyamorie », on entend souvent en écho « tromperie » alors que ça n’a rien à voir… Pareil, quand on entend « sadomasochisme » on entend « déviance »… Ce qui s’écarte de la norme imposée par notre société et ses valeurs est perçu de manière négative. Mais la norme est-elle aussi sécure qu’on veut bien nous le faire croire ?
La norme sexuelle -car il en a bien une- est-elle aussi plaisante, exempt de toute malveillance ? Alors évidemment, à travers mes mots, vous comprendrez que l’idée même de norme sexuelle créatrice de complexes et clichés est complètement absurde, voire dangereuse. Mais nous devrons bien aborder le sexe vanille. Car c’est de cela dont nous allons parler, comme la norme sexuelle par excellence.
Du coup, cette sexualité classique, en quoi consiste-t-elle exactement ?
D’un côté, le sexe vanille est profondément imprégné de l’hétéronormativité, de la mono-norme et l’amatonormativité, du sexisme, phallocentré au plus haut point… D’un autre côté, s’il est abordé positivement sous le biais du féminisme par exemple, cette préférence sexuelle dite « classique » est tout simplement un ensemble de positions sexuelles classées comme plus ‘confortables’. Opposé aux pratiques sexuelles considérées encore -avant tout diagnostic- comme trouble paraphilique par essence. Par exemple, le « fétichisme », « l’exhibitionnisme » ou encore le « sadisme » etc. Mais bon, ici dans l’équipe du magazine on est bien persuadé·e que tant que vos préférences sexuelles hors-normes ne nuisent pas aux autres ou vous-même, c’est bien loin d’être un trouble psychiatrique. Quand est-ce que les mœurs vont évoluer ?!
Ce qu’il faut bien garder en tête, c’est que le sexe vanille et les pratiques qui le définissent, changent suivant les sociétés et les époques. Car oui, les diverses pratiques et préférences sexuelles non-conventionnelles que l’on connaît mieux aujourd’hui ont toujours existé… simplement, il a fallu du temps pour les visibiliser. Nous ne sommes plus à une époque où certaines pratiques sexuelles étaient punies par la loi. Du moins pas en France.
Si on s’en tient aux clichés et idées-reçues sur le sexe vanille, il serait soi-disant « romantique mais routinier et vite ennuyeux » (est-ce que vous déceler l’arophobie ?). Il mettrait en avant la tendresse, les baisers, les caresses etc. fait pour les « amoureuxses des films de Noël ». Tous ces clichés et toutes ces idées reçues peuvent avoir une part de vrai, certes. Mais ces clichés et idées reçues sur cette préférence sexuelle sont dû à la mise en avant d’autres préférences, elles, stigmatisées et donc perçues comme négatives (e.g. « Les pratiques BDSM sont pour les obsédé·e·s sexuels qui baisent sans sentiments, sans tendresse et ne savent pas ce qu’est le romantisme »). J’ai aussi déjà entendu des adeptes des pratiques BDSM (« Bondage, Discipline, Domination, Soumission, Sado-Masochisme ») balancer des pics aux adeptes du sexe vanille et percevoir cette dernière comme négative ou adhérant à certains clichés/ idées-reçues (e.g. « vite ennuyeux »). D’ailleurs que ce soit en soirée, en date, sur les réseaux sociaux etc. il y a tout une campagne de dénigrement du sexe vanille en réponse à la stigmatisation subie par la communauté BDSM. Mais pourquoi est-on si dur avec le sexe vanille ? Le pauvre nan ?! /s
Le sexe vanille est-il vraiment « romantique mais routinier et vite ennuyeux » ?
Oui et non. Les clichés et idées-reçues ont, à mon sens, une petite part de vérité. Certaines personnes reproduisent les mêmes positions, restent dans leur confort et s’y sentent toujours à leurs aises sans jamais s’ennuyer. Quand d’autres n’apprécient pas du tout tomber dans un schéma définit à l’avance, dans une routine sexuelle. Mais pourquoi pense-t-on que c’est spécifiquement dans une sexualité classique qu’on va le plus s’emmerder ?
Le sexe vanille étant la référence sexuelle de notre société patriarcale, il y a de quoi en dire du mal, surtout si elle n’est pas abordée positivement. La norme nous conforte encore dans l’idée que « faire l’amour » rime avec sexe vanille et que les autres pratiques sexuelles riment avec « baiser » et autres termes d’emblés péjoratifs. La norme nous conforte aussi dans l’idée que sexe vanille rime avec sexualité entre homme/ femme cisgenres (notamment en vue de procréer), avec homme dominant/ femme soumise, avec plaisir de la femme mis de côté, avec femme sans expérience/ homme expérimenté, avec jeune femme/ homme âgé, avec pénétration et non circlusion, avec « préliminaires » (faites-moi disparaître ce mot !) plutôt que cunnilingus, fellation, masturbation etc. et surtout course à l’orgasme.
Alors que la sexualité vanille -si elle est déconstruite- est inclusive, féministe, positive et assurément porteuse de moments tout autant jouissifs que n’importe quelle autre pratique.
On peut pratiquer le sexe vanille quand on est LGBTQIA+, à plusieurs (tout le monde ne couche pas qu’à deux partenaires), en étant handicapé·e (le validisme ce serait bien de l’éradiquer), en ne pratiquant que la masturbation mutuelle (la pénétration n’est pas obligatoire), en ayant plus de soixante-dix ans (oui vos parent·e·s et grands-parent·e·s ont encore le droit aux relations sexuelles), en se fichant de qui peut bien être dominant·e, soumis·e ou aucun des eux etc. Ça paraît déjà bien plus sain nan ?
Il y a-t-il une position de dominant·e/ soumis·e dans le sexe vanille ? Peut-on parler de dominant·e/ soumis·e dans le contexte d’une sexualité classique ?
Il faut noter que cette idée de dominant·e/ soumis·e dans le sexe vanille est sacrément absurde. Ça sous-entend souvent que quelqu’un·e mène la danse. Alors que le sexe avec autrui, c’est un moment que l’on partage avec l’autre/ les autres : on le fait ensemble. Puis perpétrer l’idée qu’il y aurait un·e dominant.e dans un rapport sexuel classique, c’est un bullshit d’hétéro nan ?! Parce qu’en soit ça ne veut pas dire grand-chose… Dans les pratiques BDSM, il y a des rapports Domination/ Soumission consentis, encadrés, désirés. Avec des règles et des limites qui permettent la plus grande bienveillance et sécurité. Et c’est ce genre de pratique sexuelle qui tente les adeptes, c’est explicite.
On consent à être un·e soumis·e (sub) ou un·e dominant·e (dom).
J’ai du mal à envisager une forme de Domination/ Soumission dans la sexualité vanille… S’auto-déterminer, se voir comme dominant·e parce qu’on pratique des positions plus actives que saon partenaire, ça n’a aucun sens. C’est même dangereux car inégalitaire… Certaines personnes vont donc se retrouver dans un rôle de personne soumise sans l’avoir consenti, être perçu·e comme soumis·e sans l’avoir consenti car iel préfèrent des positions sexuelles moins actives. Imaginons qu’une personne handicapée se sent plus à l’aise dans des positions « simples » (selon la norme) car confortables, ce ne serait pas correct d’envisager que ces personnes soient d’emblée soumises… surtout si la relation sexuelle est entre une personne valide et une personne handicapée. Il y a déjà un rapport de domination instaurée par la société entre une personne valide et une personne handicapée : n’appliquons pas cette norme à la sexualité.
De même pour ces dames qui se disent dominantes, car elles font des positions plus actives ou soumise, car moins active : ça n’a aucun sens. Qui décide que telle ou telle position sexuelle attribue un rôle à quelqu’un·e ? Et puis, ça ne prend pas en compte le consentement de lae partenaire de penser ainsi. Il faut vraiment arrêter avec cela. Profitons du moment et arrêtons ses positionnements inutiles (sauf s’ils sont pertinents pour vos relations sexuelles) ! Mes meilleures fois vanilles, c’étaient celles où on ne se posait jamais cette question. Où on était tellement attentif·ve au plaisir de l’autre et à fond dans le moment que ça ne nous serait jamais venu à l’esprit… et en y repensant, il y avait égalité totale (en oubliant les rapports de dominations instaurés par la société e.g. homme cisgenre vs personne sexisée). Parce que la définition de dominant·e/ soumis·e dans le sexe classique est basé sur des critères profondément sexistes, LGBT+phobes, validistes… et cela perpétue les discriminations.
Et pour le romantisme alors, il n’intervient que dans le sexe vanille ?
Pour ce qui est du romantisme, c’est du bullshit de croire qu’il n’intervient que dans le cas du sexe vanille.
Le romantisme n’est pas propre à une forme de sexualité, il se retrouve aussi dans des pratiques BDSM par exemple, tout comme il peut être absent du sexe vanille.
C’est comme croire que l’affection (les sentiments particuliers que l’on peut ressentir pour autrui) et les relations sexuelles sont indissociables : c’est faux. On peut relationner sexuellement avec quelqu’un·e sans ressentir une certaine affection, tout comme on peut affectionner quelqu’un·e sans vouloir des relations sexuelles avec ellui. De plus, il existe des personnes aromantiques (qui ne ressentent aucun désir romantique ou peu : c’est un spectre.). Il ne faut pas les oublier ! Les personnes aromantiques ne projettent pas une norme romantique sur certaines pratiques sexuelles, ne perçoivent pas telle ou telle pratique sexuelle comme romantique et peuvent avoir des relations sexuelles (ou pas) sans romantisme.
Cette idée qu’on peut avoir sur la sexualité conventionnelle = romantisme VS sexualité non-conventionnelle = pas de romantisme, vient directement de notre éducation romantico-sexuelle, notamment les médias (coucou le porno mainstream problématique hein). Et notamment des films et séries qui véhiculent ces idées reçues…
Y a-t-il une définition unanime alors ?
Je ne pense pas qu’il y ait une définition unanime de la sexualité vanille. Il doit y en avoir autant que de personnes qui la pratique, de la plus problématique à la plus sécurisante. Le tout est d’avoir conscience des privilèges qu’elle accorde ou des oppressions qu’elle reproduit quand elle co-existe avec la norme patriarcale (mais peut-on vraiment se défaire de cette norme dans nos rapports sexuels ?). J’espère en tout cas que cet article vous aura fait réfléchir ! Si vous avez des questions, elles sont les bienvenues dans mes messages privés Instagram.