Quand Instagram sert à se faire du bien

Peux-tu te présenter ? Qui es-tu ? D’où viens-tu ? Ton parcours ?

Je suis Maïlys, du compte Instagram @alternative_body.

Je suis Brestoise, et j’ai 28 ans. Dans la vie je suis designer textile, passionnée de plantes et de déco vintage, follement amoureuse, fraîchement maman (quoi, ça fait déjà 16 mois ?!), heureuse et épanouie.

De quoi parle ton compte ? Qu’est-ce qu’on y trouve ?

Mon compte Instagram est l’aboutissement de ma photo-thérapie, que j’ai entamé il y a 6 mois, pour réapprendre à m’aimer. Pour réapprendre à aimer ce corps, et à le célébrer comme il se doit. J’y publie les photos des shootings pour lesquels j’ai posé, dans un esprit boudoir, en lingerie ou nue.

En stories, je partage mes coups de cœur du jour. Ce sont souvent des photos issues de comptes de modèles ou de photographes dans ce même esprit bodypositif/acceptation de soi. J’essaie de casser les codes de la société actuelle, de montrer que tous les corps sont beaux.

Je parle donc des beautés plurielles, des diktats de la société, j’essaie de faire voler en éclats les clichés patriarcaux.Mais je suis aussi attachée à parler d’amour, d’identité, de genre, de sexualité, de poils, d’IVG, de règles…

Bref, c’est un compte qui me ressemble, qui me résume un peu, où s’entremêlent défense des droits LGBT+ et féminisme.

Crédit Photo : Chloé Mazurier

Pourquoi avoir eu envie de le faire ?

J’ai créé ce compte pour partager les photos de ma toute première séance photo body positive. J’avais ces images sous les yeux, je me trouvais un peu plus belle que la veille, je me disais que j’avais fait un petit pas de plus, vers l’acceptation de mon corps, mais que j’avais besoin de plus. J’avais besoin de me confronter aux regards des autres.

Pourquoi Instagram ?

C’est un réseau social que j’apprécie particulièrement, il y a une communauté incroyable autour du bodypositivisme, de la bienveillance, du féminisme, etc… Je suis mille et un comptes passionnants qui font enfin bouger les lignes.

C’est tout naturellement que je me suis lancée sur ce réseau.

J’ai bien fait, depuis j’ai fait de belles rencontres humaines, des personnes qui me suivent depuis les débuts, j’y ai reçu énormément de soutien, et d’amour. Des retours hyper-positifs. Et de jolies collaborations !

Crédit Photo: Chloé Mazurier

Parle-nous de la photo-thérapie, ça fonctionne ?

Oh ouiii ! Je suis, mais tellement, bien dans ma peau aujourd’hui. Maintenant je marche la tête haute dans la rue, je me vois différemment dans le miroir. Je vois toujours tous ces petits trucs que je n’aimais pas avant, mais maintenant, j’ai compris qu’ils faisaient partie intégrante de ma personne, et que ça ne me rendait que plus belle.

En fait, c’est surtout la confiance en soi, l’amour qu’on se porte soi-même qui nous rend beau/belle.

On a vu que tu réponds aux dick pics et aux dragueurs, pourquoi et comment ?

C’est mon côté chieuse, je crois. Je supporte plus de me laisser faire. Pour moi, se taire, c’est accepter. Même si je conçois qu’on n’a pas forcément la force/l’envie/le courage de répondre.

J’en ai parlé sur mon compte Instagram, en stories il y a quelque temps, un mois après l’ouverture de mon compte. C’est difficile de faire un résumé, alors je le partage ici en intégralité :

« Le harcèlement quotidien (les dragueurs, les relous, et les dickpics)

Pourquoi j’ai décidé d’en parler ici ?

J’ai ouvert ce compte Instagram, il y a tout juste 4 semaines ! J’ai longtemps hésité à ouvrir ce compte, à publier les photos de mon projet d’acceptation de mon corps, de mes complexes. J’ai hésité parce que ce sont des photos de corps, de mon corps, de mon intimité. Au delà du regard extérieur sur mon corps, du jugement des autres, je savais -je savais !- que je m’exposais à recevoir des commentaires, des messages privés déplacés. 

Je me suis dit qu’il en était assez de se cacher, de devoir mettre ses projets et ses envies de côté pour quelques remarques déplacées, et quelques voyeurs. Après tout, c’est un projet autour du bodypositivisme, du feel good, de la bienveillance. Il ne devrait pas y avoir trop de risques. Et au pire, je pourrais simplement bloquer les personnes dérangeantes. #QueNenni #TuEsBienCréduleMaPauvreFille

Je me suis dit qu’il en était assez de se cacher, de devoir mettre ses projets et ses envies de côté pour quelques remarques déplacées, et quelques voyeurs. Après tout, c’est un projet autour du bodypositivisme, du feel good, de la bienveillance. Il ne devrait pas y avoir trop de risques. Et au pire, je pourrais simplement bloquer les personnes dérangeantes. #QueNenni #TuEsBienCréduleMaPauvreFille

Crédit Photo: Chloé Mazurier

Dès la première photo -la première-, beaucoup de soutien, une vague d’amour, et d’encouragement. Mais aussi, des profils douteux qui commencent à me suivre. Puis les premiers messages privés, -tu sais ceux que tu reçois sur Tinder à la pelle, sans aucun contenu intéressant, envoyés à la chaîne par des mecs en manque, dans l’espoir qu’une des 50 nanas choisies au hasard-ou presque- leur réponde ?

«bonjour-ça va-t’as quel age ? »

« t’es jolie-tu fais quoi ? »

« j’aime tes formes-t’es sexy »

« bjr-intéressée pour des messages coquins ?»

« t’es trop sexy -tu m’excites »

Alors euh non, les mecs, là il y a un truc qui va pas. Je suis ici pour parler de bodypositivisme, pas pour trouver un plan cul tout naze. Je pensais que c’était clair.

Ca c’était pour les messages soft, j’en ai quatre par jour. QUATRE PAR JOUR ! Alors bon, je réponds en disant que je ne suis pas intéressée. Merci. Bonne journée. Mais, il y a ceux qui insistent malgré tout, qui te parlent de cul au bout de deux phrases (tu viens de leur dire que t’étais pas intéressée!). Et ceux qui t’envoient une photo de leur bite pour te convaincre. Euh, non. Juste non. (j’en vois une ou deux par jour…) Très clairement, ça s’appelle une agression. Déjà juste dans l’approche. Et puis dans l’insistance. Et cette bite, merde, j’ai pas envie de voir ça. Pas là, pas maintenant, pas la tienne mec.

Pourquoi je tente systématiquement un dialogue ? Pourquoi je ne bloque pas directement ?

Parce que à mes yeux ne rien faire, ne rien dire, c’est laisser la personne gagner. C’est accepter les agressions, le harcèlement. C’est devenu tellement banal, tellement courant, que je m’attendais à recevoir quelques messages déplacés -dans quel monde, c’est sensé être normal ?- en publiant ces photos sur Instagram. La nudité n’est pas un appel à la sexualité.  Une nana qui montre une fesse, une jambe, un sein, un bout de peau, le fait pour elle. Pour une raison connue et assumée, ou une raison intime et personnelle. Mais certainement pas pour être abordée comme si elle était une fille facile, en manque de « aubergine » Désolée, mais ça n’existe pas les filles faciles. Ça ne veut rien dire.

**Une petite parenthèse, je parle de mecs qui harcèlent des nanas, parce que c’est mon vécu ici. Il y a sûrement des mecs qui harcèlent des mecs pour la même chose, des nanas qui agressent des mecs, ou des nanas qui tentent des approches malsaines envers d’autres nanas.

Mais moi, si je trouve une nana canon -et oh oui, ça m’arrive- il ne me vient pas à l’idée d’aller la contacter en mp pour lui dire que je la trouve éperdument canon, et que sous la chaleur de ma couette, il m’arrive d’avoir une pensée pour elle. (t’as vu, même là, je suis plus soft que tous les messages précédents!) Tout au plus, je laisse un petit commentaire sous la publication, tout sage, tout propre. #UnPeuDeRespectBordel Idem, vis-à-vis d’un mec. Si ça doit matcher, ça se fera, mais en douceur. #EnfinDansUneAutreVie #JeSuisAmoureuseEtHeureuse**

Donc, oui, je prends la peine de répondre, de discuter, à chaque fois. Parce que bon, il y a peut-être un malentendu tout simplement. Parce que j’ai tendance à toujours chercher le meilleur en chacun. Alors, je laisse une chance. Parce que le mec, il se rend peut-être pas compte que son approche est déplacée. Parce que si personne ne lui dit rien, il n’a aucune raison de se remettre en question. Je le fais aussi pour mon moi plus jeune qui aurait aimé ne pas être confronté à ce type de comportement si tôt. Pour ceux.celles qui n’osent pas, qui n’ont pas les mots. Pour que ma fille grandisse dans un monde un peu différent.

Je m’attache à répondre toujours sereinement, posément. Dans l’optique d’un dialogue le plus simple et limpide possible. Je ne cherche pas à agresser moi-même la personne en face de moi. Juste à lui faire comprendre que le respect est en PLS dans un coin et que ce serait sympa de le réanimer. C’est rarement bisounoursland. Souvent, le dialogue est impossible, et je finis par bloquer la personne. Mais j’ai essayé et surtout, j’ai posé le mot agression ou harcèlement. Et parfois -miracle-, des excuses sincères. Et ça rattrape alors tous les échecs cuisants. Rien que pour ça, je continuerai à ne rien laisser passer. Je partage parfois en story quelques relous du jour, parce qu’il n’y a pas de raison de cacher ça dans un coin. Parce qu’il faut que cela cesse. Et aussi, parce que les jours où je le fais, ça en refroidit certains.

Avec l’expérience, c’est triste, mais je repère directement les profils douteux. Les commentaires étranges. J’en viens même à savoir, si le mec va m’aborder dans la journée, ou plutôt dans la semaine. En ce moment, j’ai un poète lover qui attend son heure. Un fétichiste des pieds qui attend que je sorte du pédiluve, et quelques autres qui ne vont pas tarder à se désabonner suite à mes stories, et c’est pas plus mal.

J’aimerai vraiment que les mentalités évoluent. Que l’on puisse mener un combat déjà pas facile autour de notre rapport au corps, sans avoir tant d’autres combats à mener. L’éducation, le respect des autres, c’est l’affaire de tous. Je ne sais pas si je mène ce combat de la bonne façon, si j’ai toujours les bons mots. J’essaie de faire au mieux. De comprendre aussi la personne face à moi.  D’être à l’écoute. Je ne cherche pas à donner de leçons non plus. Je veux seulement un monde plus juste, plus de respect, plus d’égalité. « 

Crédit Photo: Chloé Mazurier

Un message à faire passer à nos très gentils lecteurs.rices ?

On est tou.te.s beaux.belles ! On mérite tou.te.s de s’aimer et d’être bien dans notre peau.

N’hésitez pas à tenter l’expérience d’une séance photo bodypositive, ça peut aider à se retrouver.

Aimez-vous, bordel, aimez-vous !

Ps : En plus d’être une femme extraordinaire qui nous fait du bien, elle est aussi une talentueuse artiste qui fait des broderies incroyable, que vous pouvez retrouver ici : claralily.fr

L'incarnation du magazine, avec sa propre personnalité, ses propres aventures et ses propres récits. Il est libre, ouvert et souvent incorrect. Derrière lui se cache tout.e.s les rédactr.ices.eurs qui ne veulent pas donner leurs identités lors de certaines histoires. Il est la liberté d'être ce qu'on veut à jamais : Épanoui et en train de manger des pâtes !

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