Vous connaissez le « vu » sur les différents réseaux ? Cette petite annotation qui signifie que votre message envoyé, a été regardé par votre destinataire. Le vice est même poussé jusqu’à ce que vous sachiez exactement à quelle heure votre message a été ouvert.
Ceci étant dit, laissez-moi vous raconter une histoire. Qui ne m’est pas arrivée, évidemment. C’était une copine. (Faites semblant d’y croire, s’il vous plaît)
Il était une fois une fille qui vivait sa vie dans l’allégresse et la joie. Une fille comme tant d’autres : indépendante, joyeuse, responsable, sûre d’elle, bien dans sa culotte. Elle fait subir son SPM à son entourage une fois par mois, lit Kerouac pour faire genre qu’elle est indomptable, met de la crème anti-frottement entre ses cuisses l’été et porte un bonnet prune en hiver. Elle ne demandait rien à personne quand tout à coup (BIM) un homme venu du passé recroise son chemin.
Cet homme est un jeune homme tout à fait charmant. Charmant, comme le prince. Mais des temps modernes. Le genre de type intelligent, cultivé, sensible, avec une réflexion fine. On ne va pas se mentir, le genre de mec qui fait rêver. Le genre d’homme qui, quand il vous regarde, vous ne savez pas si vous allez lui sauter dessus ou vous évanouir. Le genre de gars avec un corps contre lequel tu veux te blottir, même si c’est un inconnu dans le métro et qu’il sent un peu le pipi.
Il est brun, il est beau, il a un charme à se damner.
Nous avons nos deux protagonistes.
Le hasard de la vie fait qu’ils se retrouvent à discuter sur les réseaux sociaux. De manière douce, ils parlent du temps qui a passé, ils partagent leurs vies et se confient.
Plus les échanges se succèdent, plus elle se dit que cet homme est vraiment charismatique, qu’elle a faim, qu’il est 16h et qu’elle en ferait bien son goûter. Plus elle le trouve charismatique, plus ils rentrent dans un jeu de séduction.
« Je t’ai toujours trouvé stimulante également, dans tous les sens du terme. »
Elle prend ses mots qui lui offre et les garde précieusement. Il écrit bien, c’est délectable. Cela fait longtemps qu’aucun homme n’a réussi a la toucher avec des mots, il réveille complètement la sapiosexuelle en elle. Elle commence à le fantasmer, à l’imaginer ruisselant lorsqu’il sortirait de l’eau d’un lac abandonné où seules leurs deux âmes se trouvent unies pour l’éternité. En somme, elle l’imagine nu et sexy comme dans un clip de R’n’B.
Soudain, il commence les confidences.
« Ces gestes étaient tout à fait conscients et désirés. J’aimais te sentir dans la paume de ma main. Combien de fois me suis-je imaginé répéter ce geste sur ton corps nu ? »
Elle s’enflamme entièrement,tel un feu de forêt en plein mois d’août dans le sud de la France à cause d’un connard qui jeté son mégot de camel par la fenêtre de sa clio. Elle se sent belle, elle se sent femme, elle se sent désirable. Et ça lui fait du bien. Elle se rend compte que c’est ce dont elle avait besoin à ce moment de sa vie, une passion simple et légère avec un homme intelligent. Elle se voyait déjà partager fluides, plaisirs et conversations profondes avec lui. Des activités bien profondes même.
Juste une passion érotique, comme on peut lire dans les livres. Une passion entre deux personnages libres ayant la fureur de vivre tout ce qu’il y a vivre, un moment court et flamboyant. Un épisode qui le sortirait du spleen dans lequel il se noie, et qui la conforterait dans ses choix de vie et d’aventures.
Puis vient des promesses.
« Je ne doute pas que je trouverai le temps, bientôt, de venir admirer à nouveau ton sourire »
Le jeu était lancé. Plus de demi-mots, mais seulement de l’honnêteté pure, concernant leur intérêt mutuel, physique et psychique. Ils se sont dit qu’ils se plaisaient, qu’ils avaient envie d’aventure ensemble, qu’il n’y avait aucune raison de ne pas vivre cette envie. Et la phrase est tombée, venue tout droit de ses doigts à lui.
« J’ai envie de te voir nue. »
Ah, quelle phrase douce et perturbante à la fois. Elle annonce de belles choses et en même temps, il faut se lancer. Alors elle prend son courage à deux mains et se dit qu’il n’y a aucune raison d’attendre leur rencontre physique pour commencer à se découvrir. Pensant que cela ne pourrait qu’imager tous les mots échangés, elle s’est mise à chercher dans son téléphone des photos d’elle dénudée.
Des photos où elle se sent belle, aussi belle que dans ses mots à lui.
Elle pense qu’elle ne risque rien, il est consentant, ils sont dans un jeu de séduction, ils vont se voir, ils en ont tous les deux envie.
Elle envoie sa photo.
(Une très belle photo réalisée avec les conseils d’un article « l’art de la dickpic » d’un super magazine Le Cul bordé de Nouilles, vous connaissez ?)
« VU »
Une simple petite annotation en bas d’une conversation qui attrape ta dignité et lui donne une bonne grosse claque. Enfin ça, c’est le premier jour. Le deuxième jour, le « vu » attrape ta dignité par les cheveux et c’est pas pour faire une bonne levrette. Le troisième jour, il l’attrape à la gorge et l’insulte en allemand. Le quatrième jour, ta dignité est en boule, en train d’appeler sa mère. Le cinquième jour le « vu » a appelé ses potes : remise en question, culpabilité, dégoût et déception pour un giga Bukkake sur ta dignité. Pour finir la semaine, ton estime de soi a essayé de parler au « vu » mais elle est dans le coma après avoir pris un bon crochet du gauche.
Vous l’aurez compris, elle a vécu son premier nude laissé en « vu ».
Elle a été abordée et séduite. Elle a pris son courage à deux mains en se dévoilant à cet homme et elle a juste fini à poil dans une conversation messenger.
J’ai … hm non, je veux dire … Elle a été blessée parce qu’aucune raison n’est valable pour ignorer une personne à ce point, alors qu’elle s’est offerte. Puis elle a eu des moments de doutes, sa confiance en elle a été mise à rude épreuve. Elle s’est demandé si elle avait fait une erreur, si elle avait mal compris et même si elle était dégoûtante ou répugnante.
La demoiselle ne comprenait pas comment cet homme si fascinant pouvait être indifférent à sa démarche de concrétiser ce qu’il avait lui-même demandé.
Elle était prête à perdre ses illusions sur lui et leur hypothétique aventure. Mais elle n’était pas prête à perdre le respect qu’elle avait pour elle-même.
Alors elle est partie voir ses copines, a bu du vin et a raconté toute l’histoire. Réponse immédiate et unanime.
« Mais naaaaaaaaaan, haaaaaaaaaan le bâtaaaaard ! »
Elle s’est dit qu’en effet, il était idiot, parce qu’elle offrait quelque chose de beau et que peu importe le contexte dans lequel il se trouvait, il ne pouvait pas rester indifférent et muet. Ne serait-ce que par respect pour la fille qui a galéré à faire un nude beau, sexy, érotique et pas une photo dégueulasse dans le miroir de sa salle de bain.
Toutes ressemblances, avec une histoire qui me serait arrivée à moi-même, seraient totalement (pas) fortuites.